S’appuyer sur l’intelligence et l’énergie des plus pauvres pour mettre en œuvre les Objectifs de Développement Durable



Le 19 juillet dernier, Isabelle Pypaert-Perrin, déléguée générale du Mouvement International ATD Quart Monde a participé à la réunion « les tendances à long terme et scénarios pour renforcer les capacités des personnes et assurer l’inclusion et l’égalité » organisée par le Conseil Economique et Social de l’ONU « l’ECOSOC » et a pris la parole devant des représentants d’états membres de l’ONU, d’agences onusiennes et de différentes ONG.

António Guterres, le Secrétaire Général de l’ONU a indique que la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD) nécessite la participation de tous les acteurs à l’élaboration, la conception  la mise en œuvre et l’évaluation des ODD. Il souligne  que le développement inclusif exige une connaissance qui soit partagée avec les personnes en situation de pauvreté et qui s’appuie sur leur intelligence, leur expérience et leur savoir.

Il indique « ce savoir des populations en situation de pauvreté nous manque pour réaliser les ODD, car ce sont elles qui peuvent nous aider à comprendre pourquoi et comment certains sont laissés de côté et même poussés vers le bas, et comment bâtir des sociétés plus inclusives et durables. »

Isabelle Pypaert-Perrin a souligné dans son intervention que le Mouvement ATD Quart Monde, a acquis l’expérience qu’il est possible de permettre aux personnes en situation de pauvreté d’être des acteurs de connaissance à égalité avec d’autres si nous allons à leur recherche et si nous créons les conditions qui leur permettent de travailler et d’exprimer librement leur pensée. Elle a rappelé à cette occasion les travaux conduits pendant 3 ans aux côtés de l’Université d’Oxford qui a rassemblé des personnes en situation de pauvreté, des universitaires et des acteurs de terrain du Bangladesh, de la Bolivie, des États-Unis, de la France, du Royaume Uni et de la Tanzanie.

Celle-ci a indiqué : « à travers cette démarche où se sont croisés le savoir de personnes en situation de pauvreté, le savoir d’universitaires, et le savoir d’acteurs de terrain, nous avons identifié des dimensions qui s’ajoutent à celles plus classiques des privations. Par exemple, la maltraitance sociale et la maltraitance institutionnelle. Et puis, les participants ont exprimé ce qui est pour eux le cœur de l’expérience de la pauvreté : la souffrance, la résistance à la misère et à la fois un phénomène constant de « disempowerment » (dépossession du pouvoir d’agir) : vous luttez sans cesse pour vous, vos enfants, vos voisins, pour vous en sortir, et vous êtes toujours rabaissés, écrasés.

Au cours de son intervention, la déléguée générale du Mouvement International ATD Quart Monde a partagé une expérience récente aux côtés d’un groupe de personnes dont la vie est très difficile, « les familles solidaires ». Ces familles s’encouragent et ont développé une solidarité vis-à-vis de celles et ceux qui vivent les situations les plus critiques. Elles sont attentives par exemple à celui qui risque de mourir faute de soins, à telle maman qui n’a pas d’argent pour envoyer les enfants à l’école. Dans ce groupe, une mère « Madame Louise » a expliqué que pour nourrir sa famille, elle se rend au marché et se fait embaucher pour porter d’énormes sacs de provisions sur son dos. Parfois une voisine lui demande de l’aide. Elle-même, elle n’a rien, alors elle lui dit : viens avec moi et elle partage son travail et aussi ses gains avec elle.

Isabelle Pypaert-Perrin indique que la question posée par Madame Louise : « Nous faisons beaucoup d’efforts, nous luttons beaucoup pour que la misère disparaisse. Est-ce que nos enfants récolteront les fruits de notre lutte ou bien vont-ils mourir dans la même misère que nous ? » interroge en fait sur une injustice centrale : les plus pauvres fournissent d’énormes efforts pour faire reculer la misère, mais leur résistance ne produit pas les changements qu’ils espèrent tant qu’ils restent seuls dans leur combat.

La déléguée générale du Mouvement International ATD Quart Monde a conclu son intervention : « alors quand nous parlons de renforcer le pouvoir d’agir des personnes, sommes-nous conscients qu’il s’agit d’enraciner nos efforts, nos politiques, nos projets, dans ce que les populations en situation de pauvreté entreprennent déjà afin de donner de l’ampleur et de l’efficacité à leur action et parvenir enfin à éradiquer la grande pauvreté ? »

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