Manager la diversité pour
retrouver la croissance

« La puissance créatrice de
l'homme constitue encore l'une des rares ressources inépuisables. Ce constat
nourrit le dernier thriller en date de Luc Besson, «Lucy », dans lequel
l'héroïne éponyme tente de maîtriser ses facultés cérébrales accidentellement
décuplées au maximum de leurs capacités. Lucy illustre l'immense potentiel
créatif inhérent à chaque être humain. Dans nos sociétés où l'avoir a pris le
pas sur l'être, le facteur humain constitue la richesse immatérielle
essentielle de toute organisation. Victor Hugo dénonçait déjà en 1831 dans «
Notre-Dame de Paris » les travers d'une cité médiévale qui marginalisait un pan
entier de la société. Son plaidoyer reste actuel pour les 3,4 millions de
chômeurs dont 530.000 jeunes de moins de 25 ans, pour les 8 millions de nos
concitoyens qui vivent sous le seuil de pauvreté, les 2,5 millions de personnes
en situation de handicap. Considérés comme pas assez ou surdiplômés, trop âgés
ou trop jeunes, trop singuliers ou inadaptés, ces exclus du marché du travail
incarnent la Cour des miracles du XXIe siècle.
Ces dernières années, le
législateur a œuvré pour remettre le facteur humain à l'honneur. La loi
d'orientation du 29 juillet 1988 relative à la lutte contre les exclusions
promeut une politique d'inclusion active - dans l'emploi, la citoyenneté, la
santé, le logement - des personnes touchées par la pauvreté. La loi du 11
février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la
citoyenneté des personnes handicapées renforce, vingt ans après la loi de 1987,
l'emploi et l'obligation pour tous les employeurs d'embaucher 6 % de personnes
en situation de handicap. En pratique, cette « révolution humaine » est déjà en
marche. Pour Ricardo Semler, dirigeant de l'entreprise brésilienne Semco,
l'économique doit être au service du social. Les salariés sont
autoresponsabilisés dans la gestion de leurs conditions de travail et l'évaluation
de leur contribution. En conséquence, le turnover n'a été que de 2 % en
vingt-cinq ans et le chiffre d'affaires est passé de 4 millions de dollars à
212 millions de dollars en vingt ans. Ces initiatives nous enseignent que la
priorité doit être donnée à l'intelligence collective, source vive de création
de valeur et d'innovation.
Amis citoyens, militants et
dirigeants d'aujourd'hui et du futur, à notre tour de relayer ces initiatives.
Trois principes doivent guider notre action. D'abord, la curiosité. Incluons au
sein de nos entreprises des talents atypiques, à l'instar de Voidstarter. Cette
initiative irlandaise propose de former des chômeurs de longue durée à la
rénovation de logements sociaux, aux côtés d'artisans qualifiés. Ensuite, la
responsabilité doit donner à nos actions une valeur tangible. Dans la logique
du concept anglo-saxon de « care », refusons d'apporter des réponses techniques
à des problèmes humains. Encourageons la formation et l'accompagnement dans
l'emploi, à l'instar de la Fondation Pameijer aux Pays-Bas, qui aide chaque
année plus de 4.000 personnes déficientes. Enfin, faisons preuve d'engagement.
Evoluons vers des modes de management nouveaux. C'est cet engagement qui en
2013 a présidé au financement public de 2,8 millions d'euros en faveur de
l'emploi de 990 apprentis en situation de handicap, qui sont autant d'espoirs
en l'avenir de la fonction publique.
Sommées de produire plus et mieux
avec moins de ressources, les organisations qui rebondiront sont celles qui
sauront valoriser les singularités et l'émulation du groupe dans le dialogue.
C'est par ces échanges que se posent les bonnes questions et qu'émergent des
réponses. « Notre-Dame de Paris » fait écho à l'allégorie des « trois tailleurs
de pierres ", bien connue des managers. Ils utilisent des outils et des
techniques identiques, mais le premier explique qu'il taille une pierre, le
second qu'il construit une sculpture. Le troisième considère qu'il bâtit une
cathédrale. Valoriser l'intelligence collective c'est comprendre que l'écologie
est aussi et, avant tout, humaine.»
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